Revue de presse 1

Revue de Presse N°01 - 2013

DANS LA PRESSE…

L’apparition d’anticorps anti-érythrocytaires lors de transfusions répétées pratiquées chez les patients drépanocytaires représente un problème récurrent en pratique transfusionnelle que ce soit sur le plan de la prévention (emploi de concentrés érythrocytaires phénotypés) que sur le plan de la disponibilité de concentrés érythrocytaires phénotypés compatibles. Une équipe américaine vient de montrer que l’alloimmunisation anti-érythrocytaire est moins fréquente chez des patients drépanocytaires pédiatriques lorsque les transfusions sont effectuées par érythraphérèse (Walh et al. Lower alloimmunization rates in pediatric sickle cell patients on chronic erythrocytapheresis compared to chronic simple transfusions Transfusion 2012;52:2671-2676).

Pour cette étude rétrospective, les auteurs ont inclus 45 patients pédiatriques drépanocytaires pris en charge dans le même établissement de soins de 1994 à 2010. Vingt deux enfants ont été transfusés régulièrement par érythraphérèse et 23 par transfusion simple. Six patients du premier groupe étaient porteurs d’anticorps anti-érythrocytaires avant le début de leur programme transfusionnel et 3 pour le deuxième groupe. Les auteurs n’ont analysé que l’acquisition de nouveaux anticorps et un ratio, anticorps apparus pour 100 unités transfusées, a été employé.

Un total de 10949 unités a été transfusé à ces 45 patients sur la période considérée. Les patients traités par érythraphérèse ont acquis 3 anticorps anti- érythrocytaires (1 allo- et 2 auto-anticorps, chez 3 patients) et ceux traités par transfusion simple, 6 (5 allo- et 1 auto-anticorps, chez 4 patients). Le groupe traité par érythraphérèse a reçu plus d’unités (338,5 par patient contre 152,2, différence statistiquement significative). Le ratio, tous anticorps confondus, était de 0,040 / 100 unités dans le groupe érythraphérèse contre 0,171 / 100 unités dans le groupe transfusion simple. Pour les allo-anticorps, les ratios étaient de 0,013 / 100 unités et 0,143 / 100 unités respectivement. Les différences observées étaient statistiquement significatives. Un seul patient a présenté une réaction hémolytique cliniquement significative. Pour les autres, la découverte de l’anticorps a été réalisée avant une transfusion programmée.

Dans la discussion, les auteurs rappellent les avantages de l’érythraphérèse : méthode isovolumétrique, élimination du risque d’hyperviscosité, diminution du taux d’hémoglobine S à un taux déterminé à l’avance, limitation de la surcharge en fer. Bien que la technique nécessite le recours à un plus grand nombre d’unités, le rique d’apparition d’anticorps anti-éryhthrocytaires est diminué par rapport à la transfusion simple.

Le mécanisme demeure peu clair. Néanmoins, les auteurs émettent plusieurs hypothèses pour expliquer cette observation, dont l’élimination de l’hémoglobine S, de cellules inflammatoires et de cytokines. Sur le plan méthodologique, les auteurs mettent en avant certains points limitant les conclusions dont une possible hétérogénéité des deux groupes. Les auteurs n’ont pu comparer que l’âge de la première transfusion et le nombre d’unités auquel les patients ont été exposés. De plus, les patients ayant acquis des anticorps anti-érythrocytaires avant les transfusions programmées ont reçu des unités phénotypées (phénotype étendu) et compatibilisées. Si les patients avec anticorps pré-exitant sont retirés, la différence en faveur du groupe érythraphérèse persiste. Enfin, certains patients ont été transfusés en protocole mixte, transfusion simple / érythraphérèse. En comparant les patients ayant été traités par 85% ou plus d’érythraphérèse et ceux avec 85% ou plus de transfusions simples, les auteurs effectuent le même constat (0,044 d’allo-anticorps / 100 unités contre 0,171 / 100 unités).

Ils concluent que les inquiétudes relatives au risque d’augmentation de la formation d’anticorps anti-érythrocytaires par accroissement de l’exposition à plus d’unités liée à l’érythraphérèse ne sont pas justifiées.

En présence d’un purpura thrombocytopénique thrombotique (PTT), le recours aux échanges plasmatiques constitue un élément clé en matière thérapeutique. Néanmoins, la survenue de rechutes, avec apparition d’un caractère réfractaire caractérisé par une absence de réponse à différentes thérapeutiques initialisées (corticoïdes, médicaments immunosuppresseurs), demeure possible. Des auteurs canadiens rapportent le cas d’une patiente atteinte d’un PTT en rechute et réfractaire ayant répondu avec succès à un traitement par rituximab et bénéficiant d’une rémission à long terme (Bhagirath VC et al. Rituximab maintenance for relapsed refractory thrombotic thrombocytopenic purpura. Transfusion 2012;52:2517-2523).

La patiente âgée de 45 ans porteuse d’une cirrhose biliaire primitive et d’une hépatite virale C a été admise en 2007 pour une rechute de son PTT. Dans ses antécédents sont relevés un premier épisode de PTT 22 ans auparavant lors d’une grossesse suivi de fréquentes rechutes. Elle reçoit de multiples traitements incluant échanges plasmatiques, corticostéroïdes, azathioprine cyclophosphamide et splecnectomie. D’une fréquence d’une tous les deux ans, les rechutes commencent à devenir plus nombreuses en 2004 (au nombre de 4 cette année là). La durée des rémissions se raccourcit. La patiente bénéficie d’un premier traitement par rituximab en 2005 à la dose de 375 mg/m2 par semaine, 4 semaines consécutives. Dix neufs mois plus tard, une rechute survient traitée par échanges plasmatiques et prednisone. Un mois plus tard, après arrêt des échanges plasmatiques et de la corticothérapie, une chute du taux de plaquettes (35x109/L) conduit à la reprise d’échanges plasmatiques auxquels la patiente ne répond pas. Il en est de même après administration de vincristine (2 mg). Un nouveau traitement par rituximab est débuté à la même dose que le précédent. Deux jours plus tard, le taux de plaquettes se normalise et atteint 536x109/L au 5ème jour. En raison d’un effet indésirable, le rituximab est arrêté puis de nouveau administré à une dose identique tous les 4 mois sur un an sans effet indésirable. Au cours du suivi, la patiente est restée en rémission durant 3 ans et demi.

Les auteurs soulignent le caractère particulier de ce cas sur trois points : la dose de rituximab et la thérapeutique d’entretien, la rapidité de la réponse au rituximab obtenue en 3 jours et le suivi de longue durée permettant de confirmer la rémission. Le rituximab utilisé à des doses habituelles avec une administration intermittente lors d’une thérapeutique peut être efficace chez des patients atteints de PTT en rechute et réfractaire aux autres thérapeutiques.

La disponibilité des concentrés plaquettaires pour assurer une prise en charge transfusionnelle adaptée des patients reste un problème important dans certaines situations (éloignement site de préparation – site de stockage, opérations militaires, …). Une équipe américaine vient d’obtenir des résultats intéressants avec des plaquettes congelées conservées dans du diméthyl sulfoxyde à 6% (Dumont et al. A randomized controlled trial evaluating recovery and survival of 6% dimethyl sulfoxide-frozen autologous platelets in healhtly volunteers. Transfusion 2013;53:128-137).

Les auteurs ont réalisé une étude comparative sur des plaquettes autologues congelées dans du diméthyle sulfoxyde à 6% et des plaquettes fraîches prélevées chez des volontaires. Deux centres ont participé à l’étude.

Dans une première phase (laboratoire n° 1), des plaquettes ont été prélevées par aphérèse, mise en suspension avec du DMSO à 6%, concentrées, congelées dans les huit heures après prélèvement, conservées à une température ne dépassant pas –65° C pendant 7 à 13 jours. Dans une deuxième phase (laboratoire n°2), les plaquettes ont été conservées 2 jours à température ambiante (de 20 à 24° C) sous agitation horizontale et irradiées avant congélation (25 grays, source gamma). Les plaquettes ont été décongelées et suspendues dans du NaCl à 9 g pour mille.

Afin d’établir la cinétique in vivo, les plaquettes autologues décongelées et fraîches ont été marquées à l’aide de radioéléments puis injectées aux volontaires. Un ensemble de tests in vitro a été utilisé pour apprécier la fonctionnalité des plaquettes. Enfin, une évaluation des microparticules a été réalisée par cytométrie en flux et des études en microscopie électronique effectuées.

Les plaquettes congelées ont une réponse diminuée aux agonistes, une moindre résistance au choc hypotonique mais un profil d’activation augmenté par rapport au plaquettes fraîches. Le nombre de microparticules est augmenté parmi les plaquettes congelées et leur contenu en ATP est réduit.

Aucune différence significative entre les deux laboratoires n’a été observée en matière de taux de récupération plaquettaire (plaquettes conservées deux jours et irradiées avant congélation dans le laboratoire n° 2). La survie des plaquettes congelées est supérieure de 1,7 jours en moyenne pour la laboratoire n° 1 (congélation dans les 8 heures après prélèvement) par rapport au laboratoire n° 2. Pour les plaquettes congelées, le taux de récupération ne respecte pas le critère établi par la Food and Drug Administration. Mais, de façon surprenante, la durée de survie des plaquettes circulantes le respecte. La survie est élevée et dépasse ce critère.

Pour les amateurs de science. Dans un modèle murin de thrombopénie immune, une équipe québécoise vient de montrer que la présence, dans les immunoglobulines intraveineuses, de dimères d’immunoglobulines G tout comme de complexes immuns, ne représente pas un mécanisme expliquant l’efficacité de cette thérapeutique (Tremblay et al. Immunoglobulin G dimers and immune complexes are dispensable for therapeutic efficacy of intravenous immune globulin in murine immune thrombocytopenia. Transfusion 2013;53:261-269.) Dans le même numéro de la revue Transfusion, un éditorial replace le sujet dans le contexte historique, expose succinctement les différents mécanismes pouvant intervenir dans l’effet thérapeutique des immunoglobulines et apporte des éléments de discussion en rapport avec le mécanisme testé dans l’étude québécoise (Branch Unraveling the IVIG mystique. Transfusion 2013;53:242-244.)

Enfin, toujours sur le sujet, une revue concernant les mécanismes de l’action immunomodulatrice des immunoglobulines intraveineuses vient d’être publiée dans Nature Review Immunology (Schwab I. and Nimmerjahn F. Intravenous immunoglobulin therapy: how does IgG modulate the immune system ? 2013 ;13 : 176-189.)

Pierre MONCHARMONT

N°01
2013